Dans le cadre de projets de transformation, la réussite ne peut pas uniquement se juger à la livraison technique ou au respect du planning. Elle repose sur la capacité des collaborateurs à s’approprier les changements et à les intégrer dans leur quotidien. La mesure de l’appropriation du changement devient alors une composante essentielle de tout dispositif de conduite du changement. Cet article présente une méthode structurée autour de cinq éléments clés à prendre en compte pour mesurer efficacement l’appropriation. Il ne s’agit pas de multiplier les indicateurs ou les sondages, mais de s’assurer que l’ancrage des changements s’opère dans le quotidien des collaborateurs, en responsabilisant les équipes dans l’atterrissage de la transformation au delà de la “livraison” du projet.
Pourquoi mesurer l’appropriation du changement ?
La mesure de l’appropriation du changement est un levier clé pour piloter efficacement une transformation. Elle permet de :
- S’assurer que l’ancrage des changements s’opère dans le quotidien des collaborateurs, en responsabilisant les équipes dans l’atterrissage réel de la transformation. Ce pilotage par la preuve permet de s’assurer de l’alignement les attentes stratégiques avec les usages réels.
- Objectiver de manière structurée les problèmes d’appropriation versus le « bruit » des remontées d’informations terrain, afin de se donner un temps d’avance. Il ne s’agit pas de réagir dans l’urgence, mais de disposer d’une grille de lecture fiable pour différencier les perceptions isolées (souvent murmurées à l’oreille d’un dirigeant en visite terrain) des blocages systémiques.
- Cibler les besoins d’accompagnement, en identifiant précisément les équipes, processus ou outils qui nécessitent un effort complémentaire, et en le positionnant au bon endroit (sujet). Ce ciblage optimise les ressources et maximise l’efficacité des actions.
- Renforcer ou compléter les dispositifs existants, de manière coordonnée, en s’appuyant sur des données concrètes issues du terrain. La mesure permet ainsi d’entrer dans une logique d’ajustement continu et de cohérence globale des dispositifs de conduite du changement.
Les 5 éléments clés pour mesurer l’appropriation du changement
Pour être réellement utile, la mesure de l’appropriation doit s’appuyer sur cinq points : les sujets d’appropriation, les niveaux de mesure, les outils, les profils sondés, et la boucle retour.
1. Sujets d’appropriation
Il s’agit de lister l’ensemble des sujets d’appropriation que l’on souhaite mesurer, et de les prioriser en fonction de l’ambition business. Cette première étape est structurante pour la suite du dispositif.
- Il est possible de repartir de l’analyse d’impact réalisée en début de projet, pour croiser les sujets à fort enjeu avec les populations impactées.
- Il convient également de positionner les changements dans le temps, notamment en cas de lotissement du projet, afin d’aligner les sujets de mesure au plan de déploiement et à la bonne fréquence de mesure (fréquence régulière au début puis dégressive).
- Il est nécessaire de décider du ou des angles de vue nécessaires à l’analyse des sujets : par site, par métier, par processus, par outils, etc.
2. Niveaux de mesure
Il est important de définir au démarrage de la transformation, en sus des KPI de la transformation, les macro-niveaux de mesure de l’appropriation du changement, selon la logique suivante :
- Information
- Compréhension
- Adaptation
- Adoption
- En fonction de la phase du projet, on se concentrera sur des niveaux de mesure différents :
- Avant déploiement : mesure de l’information et de la compréhension ;
- Après déploiement : mesure de l’adaptation et de l’adoption.
- De plus, on regardera trois aspects de l’adoption :
- La qualité
- Le volume
- La rapidité
- Il est recommandé de positionner les niveaux sur une échelle de 1 à 4, afin d’éviter les réponses moyennes.
- Au-delà de l’échelle numérique, il est utile de travailler sur des observables pour qualifier l’attendu en termes d’appropriation du changement.
3. Outils de mesure
Le choix des outils est déterminant pour la réussite de la démarche :
- Il faut choisir l’outil pour déployer les questionnaires, en capitalisant sur l’existant au sein de l’entreprise.
- Il convient d’adapter l’accès aux contraintes des métiers interrogés (ex. QR code sur mobile pour populations non sédentaires).
- Un outil d’ancrage peut aussi être utilisé en complément avec un double objectif : au-delà de la mesure, il peut contribuer au renforcement de l’appropriation du changement (ex. One Minute, Sparted).
- Enfin, il est important de définir la manière d’exploiter la donnée, notamment en utilisant la data visualisation, et de décider d’ouvrir les accès au-delà de l’équipe Change notamment aux managers métiers, etc.
4. Profils sondés
Pour garantir la représentativité des retours, il est indispensable de définir les destinataires des différentes campagnes :
- Collaborateurs
- Managers
- Ambassadeurs ou champions (relais d’accompagnement du changement au sein des équipes)
- Alliés / influenceurs
- Compagnons en charge de l’assistance sur le terrain post démarrage
- Formateurs
Il est également essentiel de :
- Responsabiliser les acteurs du run notamment les managers, en local, dans la définition des plans d’actions pour ancrer le changement.
- Adapter la fréquence et le contenu de la campagne en fonction de la cible :
- Pour les collaborateurs : vision individuelle, questions fermées.
- Pour les relais : vision collective, possibilité de questions ouvertes.
- Animer les campagnes pour maximiser le taux de réponse (ex. challenge entre équipes ou individuel).
5. Boucle retour
La préparation de la boucle retour est une étape clé, souvent négligée, mais indispensable à la légitimité de la mesure.
- Il faut préparer le dispositif (voire la gouvernance) de boucle retour vers les sondés, pour partager les résultats et le plan d’actions associé.
- Le dispositif de boucle retour peut prendre plusieurs formes complémentaires :
- Une communication unit pour centraliser et donner de la cohérence à la redescente d’information ;
- Une cellule de gestion des irritants pour traiter les blocages ;
- Une équipe en charge de la création de contenus complémentaires (ex. capsules vidéos, FAQ dynamique).
Dans le cadre de nos missions chez nos clients nous avons pu mettre en place des dispositifs concrets comme par exemple
· des campagnes d’ancrage pré-bascule permettant au delà de renforcer les connaissances, d’identifier les sujets à renforcer suite aux formations pour ensuite proposer des zooms sur les contenus
· Des pulse survey administrés à partir du déploiement auprès des ambassadeurs, des formateurs et des managers pour identifier les irritants
· Des « Communication unit » pendant le mois qui suit le déploiement, en charge de centraliser l’analyse des remontées d’information et de préparer les contenus pour lever très vite les sujets nécessitant de la communication
· La création de capsules de formation « spot » par sujet pouvant être mises à disposition en selfcare ou portées par les relais d’accompagnement du changement au sein des équipes
En conclusion : développer la culture de la mesure dans la transformation
Mesurer l’appropriation du changement permet de piloter la transformation avec discernement, d’ajuster les dispositifs d’accompagnement, et de s’assurer que le changement est réellement intégré dans les pratiques. Une approche structurée, combinant :
- des sujets priorisés en lien avec l’ambition business,
- une mesure progressive en quatre niveaux,
- des outils adaptés aux populations,
- une analyse de la donnée accessible aux parties prenantes,
- et une boucle retour efficace,
… constitue aujourd’hui un levier stratégique pour améliorer durablement l’appropriation du changement.
Si vous avez des questions et souhaitez en discuter pour partager un retour d’expérience, n’hésitez pas à nous contacte
